Marchés actions et obligataires peuvent, à certains moments, et c’est actuellement le cas, envoyer des signaux contradictoires. Nous avons déjà pu expliquer cela dans nos billets hebdomadaires. Alors que le S&P 500 a franchi le seuil symbolique et historique des 5 000 points à la clôture de vendredi et que l’indice Nasdaq Composite affiche déjà une performance depuis le début de l’année supérieure à 6%, le marché des taux d’intérêt a déjà retracé la baisse de décembre (+ 40 bps sur le 10 ans US depuis ses plus bas de fin d’année dernière et +50 bps de hausse pour le Bund[4] sur la même période).

Qui a dit que les valeurs technologiques étaient sensibles aux taux ? Lunaire… pas tant que cela. En effet, si l’on compare le S&P 500 Equal Weight (+0,65% YTD) et le S&P 500 (+5,38% YTD), l’écart est notable ! Les progressions du Nasdaq Composite (+6,75% YTD) ou encore des « Magnificent 7 », comme Nvidia (+45% YTD), permettent de mieux comprendre ce qui se joue. Le secteur technologique américain est, en quelque sorte, devenu le « secteur refuge » de ce début d’année 2024, confirmant une tendance déjà observée l’année passée. Attention, néanmoins, au risque de douche froide sur l’euphorie liée à la thématique «Tech/Intelligence Artificielle » ! Lunaire, vous avez dit ? Que penser de la folle levée de fonds de presque 7 000 milliards de dollars escomptée par Sam Altman d’OpenAI ? Voilà de quoi soutenir le sentiment de marché général sur la Tech…

Du côté du mouvement sur les taux, si la baisse observée fin 2023 était clairement exagérée, les investisseurs commencent à intégrer que leurs prévisions de baisses de taux directeurs étaient trop optimistes, qui plus est en anticipant une première intervention des banquiers centraux dès mars. Comme indiqué dans notre rendez-vous du lundi du 8 janvier, le scénario du soft landing[2] est difficilement compatible avec la dernière phase de désinflation (i.e. le passage de 3% à 2%). En effet, alors que la croissance américaine pour cette année ne cesse d’être revue à la hausse (1.6% actuellement contre 1% début novembre 2023) et que certains prévisionnistes anticipent même une progression du PIB légèrement inférieure à celle de l’année dernière (2.5%), le baisse de l’inflation pourrait atteindre un plateau à cause de la reprise de la consommation, en lien avec le retour de la hausse du salaire réel. Les banquiers ont d’ailleurs invité, la semaine passée, les investisseurs à la prudence et le pivot de la FED[1] attendu en mai prochain pourrait être retardé avec une telle résistance de la conjoncture. La publication ce mardi de l’indice CPI US ainsi que les commentaires de responsables de la FED seront donc à suivre de près.

Enfin, le marché chinois sera fermé cette semaine pour cause de fêtes du Nouvel An lunaire, après un rebond notable la semaine passée (+4,65% sur le CSI 300[3] depuis le début du mois). Il est difficile de se projeter à court terme sur ce marché tant les mesures successives prises par les autorités chinoises semblent insuffisantes face à des investisseurs boudeurs. Si les dernières mesures en date (e.g. annonces sur une intervention élargie du fonds étatique Huijuin Investment, coup de balai à la CSRC, règles très strictes pour réduire les volumes de ventes à découvert…) semblent avoir permis aux marchés actions chinois de retrouver des couleurs, restons prudents car si le soleil (mesures des autorités) a donné rendez-vous à la lune (sentiment de marché et flux), comme le rappelait le « Fou chantant », « la lune n’est pas là et le soleil attend… ».

Une chose est au moins certaine, Donald Trump nous « rassure » finalement par la constance de son comportement, avec ses déclarations électoralistes sur les barrières douanières contre les produits chinois et sur les « mauvais élèves » de l’OTAN qui seraient laissés à l’abandon comme de « mauvais payeurs ». Bonne année du Dragon de Bois !


Article proposé par Auris Gestion